Est-il possible de remployer un quasi-usufruit en assurance-vie tout en désignant le nu-propriétaire comme bénéficiaire ?

L’intérêt patrimonial de recourir à une clause bénéficiaire démembrée est, comme nous l’avons vu dernièrement, bien connu : Le bénéficiaire en usufruit dispose des pouvoirs d’un plein propriétaire sur des liquidités au titre du quasi usufruit légal prévu à l’article 587 du code civil sur les biens consomptibles au premier usage et le bénéficiaire en nue-propriété dispose d’une créance de restitution à terme, en principe au nominal, constituant un passif déductible dans la succession de l’usufruitier.

La question de l’étendue des pouvoirs du quasi usufruitier soulevait une difficulté lorsque le bénéficiaire en usufruit utilisait les fonds débloqués par l’assurance pour souscrire une nouvelle assurance vie au profit de son héritier par ailleurs désigné comme bénéficiaire en nue-propriété dans le contrat d’assurance vie initial

La cour d’appel de Douai dans un arrêt en date du 12 Mai 2016 a confirmé cette possibilité en précisant « que le choix de la manière dont l’usufruitier utilise les fonds dont il a la disposition est indifférent au principe même de la dette de restitution et que la désignation de son héritier comme bénéficiaire des contrats ne constitue pas un moyen de paiement anticipé de la dette de l’usufruitier »

Le nu-propriétaire désigné comme bénéficiaire du contrat (désignation présumée à titre gratuit, à défaut de stipulation contraire) percevra alors sa créance de restitution sur l’actif successoral du quasi-usufruitier ET recevra les capitaux décès.

Afin que l’opération ne soit pas remise pour abus de droit, il conviendra d'employer les fonds sur un contrat d'assurance-vie ayant une valeur de rachat et s'assurer de la bonne santé du quasi-usufruitier à la souscription du contrat et qu'il procède à des arbitrages et retraits réguliers.

Fiscalement :

la créance de restitution permet de réduire l’actif successoral taxable et donc de réduire les droits de succession (à condition qu'une convention de quasi-usufruit soit établie par acte notarié ou enregistrée auprès du centre des impôts) ;

mais les capitaux décès seront taxés selon les modalités des articles 990 I (versements avant 70 ans) ou 757 B du CGI (versements après 70 ans).